Quel regard la société porte-t-elle sur la femme alcoolique ? La société juge, méprise et rejette la femme alcoolique. “Pour un homme, c’est moche, mais pour une femme c’est carrément dégoûtant !” Un homme qui boit trop est un bon vivant et un joyeux luron. Une femme qui boit est une “saoulotte” et une moins que rien. Les mentalités changent un peu, mais beaucoup considèrent toujours l’alcoolisme comme un vice ou une maladie “volontaire”, surtout lorsqu’il atteint l’image d’Epinal de la femme épouse et mère… Pour faire part de mon expérience et pour aider ces femmes, j’ai écrit cinq ouvrages sur l’alcoolisme au féminin : ” L’Amour en plus” (1976), “Toute honte bue” (1981), “Dans l’enfer de l’alcool” (1986), “La Coupe déborde” (1993) et ” J’ai soif !” (1996). Comment réagissent les femmes alcooliques quand on évoque leur dépendance ? 92% des femmes alcooliques refusent d’en parler et 46% d’entre elles boivent en cachette. Le besoin d’en sortir n’est pas toujours manifeste, loin de là. Beaucoup de femmes réagissent négativement lorsque l’entourage se risque à en parler. Preuve que l’alcoolisme reste un sujet tabou. Plusieurs parmi les proches prennent en main le problème de la femme, qui se laisse trimballer d’un hôpital à l’autre sans jamais l’avoir vraiment choisi. C’est pourtant là le fer de lance de toute guérison… Peut-on guérir définitivement de l’alcoolisme ? Les rechutes ne sont-elles pas inévitables ? Oui, on peut guérir définitivement de la dépendance à l’alcool. Comme de toutes les dépendances. Et même s’il y a des rechutes – je préfère ” réalcoolisation” -, elles font partie du cheminement. Si on enlève le travail sur soi, la guérison ne se fera jamais. On aura arrêté de boire, oui, mais sans plus. On restera une alcoolique non pratiquante, frustrée, amère, intolérante. L’abstinence n’est que le moyen de faire le point sur soi-même et de retrouver un équilibre et une liberté perdus. Rien de plus… Entretien réalisé par Sandrine Damie Pour plus d’informations SOS Femmes alcool 25, rue Mesnil 75016 Paris