Quelles sont les actions du GAMS ? Le GAMS est une association composée de femmes africaines résidant en France et de femmes françaises. Depuis 1984, il est la section française du Comité inter-africain sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des enfants. Le GAMS a pour objectif la promotion de la santé maternelle et infantile parmi les populations immigrées en France, plus spécifiquement auprès de celles qui viennent d’Afrique subsaharienne. Le groupe se bat pour l’éradication des pratiques traditionnelles néfastes telles que les mutilations sexuelles féminines, les mariages forcés et/ou précoces d’adolescentes, les tabous nutritionnels, les grossesses rapprochées, etc. Nous avons entendu parler de votre association par le biais de ses actions de sensibilisation et de prévention des mariages forcés : ont-elles porté leurs fruits ? Pour l’heure, c’est difficile à déterminer et à mesurer. Nous avons toutefois une première estimation statistique, réalisée par mes soins, pour le GAMS. L’étude date de l’année 2000 et porte sur les fillettes scolarisées depuis 1992-1993 dans le département des Yvelines : 2 500 adolescentes originaires d’Afrique noire, âgées de 10 à 18 ans, y étaient mariées de force précocement ou étaient menacées de l’être. Nous avons choisi de ne traiter que des adolescentes d’Afrique noire parce que c’est notre principal champ d’expertise. Mais ces estimations pourraient être étendues aux populations originaires d’Afrique du Nord, d’Asie (Cambodge, Pakistan, Vietnam, etc.) et de Turquie qui résident dans les Yvelines. Au total, ce sont sans doute 5 000 adolescentes d’origine migrante, âgées de 10 à 18 ans, qui ont été mariées de force précocement ou menacées de l’être dans ce département. A l’échelle de la France, dans les 14 départements les plus concernés, nous pouvons estimer qu’environ 70 000 adolescentes d’origine migrante, âgées de 10 à 18 ans, sont mariées de force précocement ou menacées de l’être. Ces chiffres sont très inquiétants et nos actions paraissent dérisoires. Mais, lors du premier semestre 2002, nous avons sensibilisé 1 290 élèves en Ile-de-France et en France. Nous avons protégé 28 adolescentes et 33 mineures des pratiques de mariage forcé et/ou précoce. Notre combat est loin d’être terminé ! L’information, l’éducation et la communication sont plus que jamais nécessaires. Quelles sont vos grandes réussites et déceptions ? Une de nos plus grandes joies remonte à décembre 2001 lorsque, pour la première fois en France, le droit d’asile politique a été accordé à des fillettes menacées d’excision. La plus grande déception est toujours d’actualité puisqu’il n’y a pas à ce jour de prise en compte des dangers auxquels sont exposés les enfants. Certains magistrats des parquets des mineurs refusent même de mettre en place des mesures de protection pour des bébés. Une lueur d’espoir nous anime toutefois : les peines de prison prononcées à l’encontre des auteurs de sévices permettent de reconnaître les fillettes et adolescentes concernées comme des victimes et permettent d’en parler dans les médias. Entretien réalisé par Christelle Célarié